Le diagnostic génétique préimplantatoire (DGP), appelé aujourd’hui le plus souvent preimplantation genetic testing (PGT), donne la possibilité d’analyser le patrimoine génétique des embryons avant leur transfert dans l’utérus. Pour des couples exposés à un risque élevé de maladie héréditaire grave ou de fausses couches à répétition, cette technique peut réduire la probabilité de grossesse atteinte ou de nouveau deuil avant même qu’une grossesse ne s’installe. Ce guide présente de manière synthétique le parcours en France, les indications, les coûts réalistes et les limites fixées par la loi et l’Assurance Maladie.
Qu’est-ce que le diagnostic génétique préimplantatoire ?
Dans un cycle de FIV ou d’ICSI avec DGP, les embryons sont cultivés au laboratoire. À un stade avancé de développement, quelques cellules en périphérie sont prélevées pour analyse génétique, avant de décider quels embryons seront transférés dans l’utérus. Le terme historique « diagnostic préimplantatoire (DPI) » reste utilisé en France, mais les recommandations internationales parlent de preimplantation genetic testing (PGT). Des sociétés savantes comme ESHRE et des instances françaises comme l’Agence de la biomédecine définissent des standards de qualité très stricts.
Important : le DGP ne remplace pas le suivi classique de grossesse ni les examens prénataux. Il peut réduire le risque de certaines maladies génétiques et d’une partie des fausses couches, mais ne garantit pas la naissance d’un enfant en parfaite santé ni une grossesse sans complication.
Glossaire rapide DGP & PGT
- DPI / DGP / PGD – terme classique pour le diagnostic génétique sur embryon avant transfert.
- PGT-M – test ciblant une maladie monogénique connue dans la famille (mucoviscidose, maladie de Huntington, dystrophies musculaires, etc.).
- PGT-A – test visant les anomalies du nombre de chromosomes (aneuploïdies), comme la trisomie 21 ou 18.
- PGT-SR – test pour les réarrangements structuraux chromosomiques (par exemple translocations équilibrées).
- niPGT-A – variante non invasive analysant l’ADN libre dans le milieu de culture plutôt que des cellules biopsiées.
Pour quels couples le DGP est-il indiqué ?
En France, le recours au DPI/PGT est très encadré et réservé à des situations bien définies. Parmi les indications les plus fréquentes :
- Présence dans la famille d’une mutation responsable d’une maladie génétique grave et incurable, avec risque élevé pour la descendance.
- Réarrangement chromosomique significatif (par exemple translocation équilibrée) chez l’un des parents.
- Antécédent(s) de grossesse(s) atteinte(s) d’une maladie génétique ou chromosomique grave, documentée(s).
- Fausses couches à répétition ou décès fœtal in utero en lien avec une anomalie chromosomique identifiée ou fortement suspectée.
- Dans certains cas, projet d’enfant « donneur compatible » (HLA) pour traiter un aîné atteint, encadré de façon très stricte.
En France, chaque indication doit être évaluée par une équipe pluridisciplinaire (généticiens, médecins de FIV, biologistes, parfois éthiciens) et faire l’objet d’une autorisation de l’Agence de la biomédecine pour le centre et, dans certains cas, pour la pathologie visée.
Déroulement d’un cycle avec DGP
- Consultation de génétique et réunion pluridisciplinaire – une équipe spécialisée analyse l’histoire familiale, confirme l’indication et explique ce que le test peut (et ne peut pas) apporter. Pour le PGT-M, des prélèvements chez des membres de la famille peuvent être nécessaires afin de construire le test.
- Stimulation ovarienne – pendant 8 à 12 jours environ, des injections hormonales stimulent les ovaires pour obtenir plusieurs ovocytes. Des échographies et prises de sang ajustent les doses.
- Ponction ovocytaire et fécondation – les ovocytes sont prélevés par voie vaginale sous anesthésie légère et fécondés au laboratoire (FIV ou ICSI). Les embryons obtenus sont cultivés en incubateur.
- Cultures embryonnaires et biopsie – au 5ᵉ ou 6ᵉ jour (stade blastocyste), quelques cellules du trophectoderme (future partie placentaire) sont prélevées. La masse cellulaire interne (future partie fœtale) n’est pas touchée. Pour niPGT-A, on analyse le liquide de culture plutôt que des cellules.
- Analyse génétique – le matériel génétique est analysé par des laboratoires spécialisés, souvent via des techniques de séquençage de nouvelle génération. Les résultats sont généralement disponibles en quelques jours.
- Transfert embryonnaire ou congélation – les embryons considérés comme transférables sur le plan génétique et morphologique sont transférés un par un dans l’utérus ou vitrifiés pour un transfert ultérieur (cycle substitué).
Tendances technologiques 2025
- Protocoles PGT standardisés – des recommandations européennes et françaises définissent les bonnes pratiques pour la biopsie, la logistique de laboratoire et le contrôle qualité, ce qui améliore la comparabilité des résultats entre centres.
- niPGT-A – l’analyse non invasive de l’ADN dans le milieu de culture est un domaine de recherche prometteur, mais encore en cours de validation, notamment pour les embryons mosaïques. En France, ces approches sont utilisées avec prudence, souvent dans un cadre d’étude.
- Imagerie time-lapse et aide à la décision par IA – des incubateurs avec caméras filment en continu le développement embryonnaire. Des algorithmes associent ces données aux résultats de PGT pour aider à classer les embryons, tout en restant des outils d’aide à la décision et non des oracles.
- Transfert électif d’embryon unique (eSET) – la tendance française est à la limitation des grossesses multiples. Le transfert d’un seul embryon de bonne qualité, souvent combiné à une stratégie de vitrification, est de plus en plus privilégié.
Coûts en France 2025
Un parcours de FIV avec DGP est plus coûteux qu’une FIV « standard » : il mobilise davantage d’acteurs, nécessite des analyses génétiques sophistiquées et implique souvent plusieurs étapes administratives. En France, la situation est particulière car une partie du coût peut être prise en charge par l’Assurance Maladie et la complémentaire santé, sous conditions.
| Poste de dépense | Fourchette de coûts 2025 | Contenu typique |
|---|---|---|
| Consultations et génétique | 200–800 € | Consultations de génétique, d’AMP, réunions de concertation, mise en place du protocole PGT-M/PGT-SR. |
| PGT-M / PGT-A / PGT-SR | 3 000–5 500 € | Biopsies, analyses en laboratoire de génétique, interprétation et compte rendu. |
| FIV / ICSI (actes techniques) | 3 000–5 000 € | Stimulation, ponction, fécondation, culture embryonnaire, un premier transfert. |
| Médicaments de stimulation | 1 000–2 000 € | Gonadotrophines, antagonistes, déclenchement, traitement de soutien. |
| Congélation et stockage | 300–600 € / an | Vitrification d’embryons et frais annuels de conservation. |
| Options (time-lapse, niPGT-A…) | 500–1 500 € | Imagerie time-lapse, analyses additionnelles, selon la politique du centre. |
La prise en charge dépend du contexte :
- Les actes de FIV/ICSI dans le cadre de l’AMP sont, sous conditions (âge, nombre de tentatives, indications…), pris en charge à 100 % par l’Assurance Maladie après accord, souvent avec une exonération du ticket modérateur.
- Les actes de DGP/PGT peuvent être, dans certains cas de pathologies graves et reconnues, pris partiellement en charge dans le secteur public ou dans des centres conventionnés. En secteur privé, une part reste souvent à la charge du couple.
- Les complémentaires santé (mutuelles) peuvent rembourser certains dépassements ou frais associés, selon le contrat.
Il est indispensable de demander un devis écrit détaillé (FIV, PGT, médicaments, conservation, honoraires) et de se rapprocher de sa caisse d’Assurance Maladie et de sa mutuelle pour connaître les montants réellement remboursés dans sa situation.
Chances de succès et risques
Les taux de succès dépendent surtout de l’âge de la femme, de sa réserve ovarienne, de la qualité du sperme, de la cause de l’infertilité et du nombre d’embryons jugés transférables après PGT. Les registres français et internationaux indiquent que les FIV modernes aboutissent globalement à des taux de naissances vivantes de l’ordre de 20–25 % par transfert, plus élevés avant 35 ans et plus faibles après 40 ans.
| Âge de la femme | Naissance vivante par transfert | Lecture avec DGP |
|---|---|---|
| < 35 ans | ≈ 30–40 % | Souvent plusieurs embryons euploïdes ; le PGT peut réduire les fausses couches et transferts « perdus ». |
| 35–39 ans | ≈ 20–30 % | Le PGT-A aide à sélectionner les embryons au caryotype normal et à éviter certains transferts infructueux. |
| ≥ 40 ans | < 20 % | Peu d’embryons chromosomiquement normaux ; le DGP apporte de la clarté sur le pronostic mais n’annule pas l’effet de l’âge. |
Risques médicaux et psychologiques
- Biopsie et mosaïcisme – la biopsie de trophectoderme au stade blastocyste est considérée comme sûre dans des équipes expérimentées, mais les embryons mosaïques (mélange de cellules normales et anormales) sont difficiles à interpréter. Les résultats « limites » nécessitent souvent une discussion pluridisciplinaire.
- Effets secondaires hormonaux – la stimulation peut provoquer ballonnements, douleurs pelviennes, fatigue ou variations de l’humeur. Les protocoles actuels visent à réduire le risque de syndrome d’hyperstimulation ovarienne, sans le supprimer totalement.
- Limites du niPGT-A – les approches non invasives sont prometteuses mais encore en cours de validation. Une spécificité imparfaite peut entraîner le rejet d’embryons potentiellement viables ; elles sont donc proposées avec prudence.
- Charge émotionnelle – l’infertilité, le risque génétique, les décisions éthiques et l’attente des résultats génétiques sont éprouvants. Un accompagnement psychologique et le soutien de proches ou de groupes de patients peuvent être précieux.
Comparaison internationale 2025
De nombreux couples français se renseignent sur des options à l’étranger, motivés par les délais, les coûts, l’âge limite ou l’accès à certaines techniques ou dons de gamètes. Quelques repères :
France
- Cadre légal clair et strict ; autorisations et contrôle de l’Agence de la biomédecine.
- DPI réservé à des indications médicales graves et soigneusement évaluées.
- Certaines prises en charge par l’Assurance Maladie, mais accès concentré dans des centres spécialisés et délais possibles.
Espagne
- Offre très large de FIV et de DGP, avec de nombreux programmes de dons d’ovocytes et de sperme.
- Cadre légal plus permissif sur certains aspects, mais encadrant la sélection de sexe non médicale.
- Coûts globalement inférieurs à ceux de nombreux pays anglo-saxons ; destination fréquente pour patients français.
Belgique
- Réseau universitaire et privé bien développé, avec forte expertise en PGT.
- Cadre légal proche de l’esprit français, avec certaines différences de pratique.
- Attractive pour des patients frontaliers en raison de la proximité et d’un environnement francophone dans certaines régions.
République tchèque
- Offre importante en reproduction assistée et PGT, souvent à des tarifs plus bas.
- Tendance à des limites d’âge plus élevées et à un recours plus large aux dons de gamètes.
- Nécessité de bien vérifier réglementations, accréditations et modalités de suivi à distance.
États-Unis
- Disponibilité très large de PGT-A et PGT-M, y compris pour des indications plus larges.
- Coûts extrêmement élevés : un cycle complet de FIV avec PGT peut dépasser facilement 25 000–30 000 USD.
- Intéressant surtout pour des patients déjà résidents et disposant d’une assurance adaptée.
Cadre légal en France
En France, le DGP/DPI est autorisé dans un cadre légal strict, principalement défini par le Code de la santé publique et les lois de bioéthique, régulièrement révisées. L’Agence de la biomédecine joue un rôle central dans l’autorisation et le contrôle des activités de procréation médicalement assistée (PMA) et de DGP.
- Le DGP est réservé aux couples présentant un risque élevé de transmettre une maladie d’une particulière gravité, reconnue comme incurable au moment du diagnostic, ou à certains réarrangements chromosomiques graves.
- Chaque centre doit être spécifiquement autorisé pour pratiquer le DPI, et les indications sont encadrées ; des critères stricts définissent les pathologies concernées.
- La sélection de sexe pour convenance personnelle est interdite ; les tests liés au sexe ne sont admis que pour prévenir des maladies graves liées au chromosome X.
- Les couples doivent signer un consentement éclairé après une information complète sur les alternatives (diagnostic prénatal, dons de gamètes, adoption, renoncement aux tests…).
- La création, la conservation et le devenir des embryons sont encadrés (limites de conservation, consentements, destruction ou dons à la recherche sous conditions).
Des informations à jour et vulgarisées sont disponibles sur le site de l’Agence de la biomédecine et sur les portails des centres de PMA publics et privés.
Conseils pratiques pour les couples
- Commencez par des sources fiables – informez-vous d’abord auprès de l’Agence de la biomédecine, de centres hospitaliers universitaires et de sociétés savantes plutôt que sur des forums ou réseaux sociaux.
- Demandez un devis détaillé – exigez un document distinguant les coûts de FIV, PGT, médicaments, conservation d’embryons et éventuels suppléments.
- Clarifiez la prise en charge – contactez votre caisse d’Assurance Maladie et votre mutuelle pour savoir ce qui est remboursé, dans quelles limites et sous quelles conditions (âge, nombre de tentatives, type de pathologie).
- Prévoyez plusieurs cycles – il est fréquent qu’un seul cycle ne suffise pas pour obtenir un embryon génétiquement transférable et aboutir à une grossesse menant à une naissance.
- Organisez un soutien émotionnel – un suivi psychologique, des groupes de parole et le soutien de proches sensibilisés au sujet aident à traverser les phases d’attente, de doute et parfois de deuil.
Alternatives au DGP et questions éthiques
Le DGP n’est ni accessible ni souhaitable pour tous. Parmi les alternatives : conception sans DGP avec recours éventuel au diagnostic prénatal (choriocentèse, amniocentèse), recours à un don d’ovocytes ou de spermatozoïdes pour éviter une mutation connue, projet d’adoption ou de recueil d’enfant, ou encore choix réfléchi de ne pas recourir aux tests génétiques.
Sur le plan éthique, les couples se situent souvent dans une tension entre le désir d’avoir l’enfant le plus en santé possible, le respect de la dignité et de la diversité des personnes vivant avec un handicap, et la crainte de banaliser la sélection d’embryons. Un accompagnement génétique et psychologique de qualité aide à clarifier ses propres valeurs et à prendre une décision cohérente avec son histoire personnelle et familiale.
Conclusion
Le diagnostic génétique préimplantatoire peut aider certains couples français confrontés à un risque génétique élevé à éviter des maladies très graves et à réduire une partie des fausses couches. La technique est maîtrisée et encadrée par un cadre légal exigeant, mais elle reste coûteuse, lourde sur le plan émotionnel et ne convient pas à toutes les situations. Prendre le temps de s’informer, de poser des questions, de peser les alternatives et de bénéficier d’un soutien adapté est essentiel pour décider si le DGP s’inscrit ou non dans votre projet parental.

